Né Pierre Tcherniakowski le 29 janvier à Paris, Pierre Tchernia grandit à Courbevoie dans un milieu modeste auprès d'un ouvrier ukrainien immigré en France. Cadet d'une fratrie de quatre enfants, il se retrouve chaque soir devant le poste familial, regardant les classiques du cinéma avec entrain. À 12 ans, il est bouleversé par "La Chevauchée fantastique" de John Ford. Sans savoir à ce moment-là que sa chevauchée à lui le sera tout autant.
Le baccalauréat en poche, il s'inscrit à l'Ecole technique des métiers du cinéma et de la photographie et intègre de justesse en deuxième année, l'Institut des hautes études cinématographiques dans une promotion qui compte également parmi ses rangs le futur réalisateur Claude Sautet. Engagé dès 1947 à l'atelier de création radiophonique de Jean Tardieu baptisé Club d'essai, il est repéré un jour par le journaliste Pierre Sabbagh, qui s'est laissé séduire par sa chronique Un mauvais quart d'heure à passer. Voilà comment Pierre Tchernia va glisser progressivement vers la TV. Il fera partie de cette génération qui a fait de la télévision car le cinéma ne lui ouvrait pas ses portes. Sans savoir que celle-ci ferait du mal au 7ème art. C'est sur les deux écrans qu'il excellera, à commencer par le petit.
De la RDF à la TNT, le journaliste va vivre les plus grands bouleversements de la télévision : le premier journal télévisé, les diffusions en direct, la première émission en couleur (Arc en ciel). Animateur dès 1948 de l'émission radio-télévisée Le Cabaret de la plume d'autruche, il travaille comme journaliste le 29 juin 1949, date de la diffusion du premier journal télévisé de l'histoire du petit écran. Auprès de deux autres journalistes et de Pierre Sabbagh, il commente des images muettes en 16mm. Un exercice qu'il fera jusqu'en 1955. Car cette année-là, l'homme de télévision qui bouillonne d'idées, décide de s'orienter vers l'animation d'émissions de variétés au travers de plusieurs formats qu'il conçoit et/ou présente (La Piste aux étoiles, 36 chandelles, L'Arroseur arrosé, Les Amoureux de la Tour Eiffel, Monsieur Muguet s'évade...).
Il diversifiera également ses exercices, toujours dans le but de surprendre le public. En 1956, on le retrouve en direct à l'animation de grands reportages depuis des lieux insolites (le haut d'un phare, l'express Paris-Lille, un puits de mine à Lens...) Dans les années 1960, il conçoit, avec Robert Rocca et Jacques Grello, la première émission d'actualités satirique La Boîte à sel.
Cette décennie marque également ses débuts aux commandes de l'émission Monsieur Cinéma, diffusée chaque dimanche après-midi sur la deuxième chaîne couleur de l'O.R.T.F. Il y présente d'abord l'actualité cinématographique, avant d'arbitrer un jeu sur le septième art et interviewer des personnalités du monde du cinéma. Devenue culte au fil des treize années de sa diffusion, l'émission vaudra à Tchernia le surnom de "Monsieur Cinéma".
Surnommé également "Ami public n°1" en référence à l'une des émissions qu'il a conçu, Pierre Tchernia parlait du cinéma mais en faisait aussi. Scénariste de films, il a surtout réalisé une poignée de comédies sociales au ton toujours bienveillant : quatre films ("Le Viager", "Bonjour l'angoisse", "Les Gaspards", "La Gueule de l'autre") et quatre collaborations avec Michel Serrault. Également acteur à ses heures perdues, il apparait en 1953 dans "Les Quatre Mousquetaires", joue un garde-champêtre dans "La Guerre des boutons" (1962), un colleur d'affiche dans "La Gueule de l'emploi" (1973) ou encore le narrateur dans deux "Astérix et Obélix", en 2002 et 2008.
Car Pierre Tchernia, au-delà d'une bonne humeur communication et d'un physique attachant, est l'une des voix préférés des français. Une voix douce de conteur qui a animé, entre autres, bon nombre de cérémonies des César et de Festival de Cannes. Une voix qui s'est tue le 8 octobre 2016. Fatigué par la vie, le géant de la télévision a éteint le téléviseur pour de bon à 88 ans. Ses dernières apparitions télévisées remontent à 2006, sur le plateau de l'émission Les Enfants de la télé, qu'il avait rejoint en 1994.
Filmographie :
Acteur
2008 : Astérix aux Jeux Olympiques, de Thomas Langmann
2002 : Astérix et Obélix : Mission Cléopâtre, d'Alain Chabat
1988 : L'Enfance de l'art, de Francis Girod
1985 : Les Rois du gag, de Claude Zidi
1980 : Signé Furax, de Marc Simenon
1976 : Les Douze Travaux d'Astérix, de René Gosninny et Albert Uderzo (Film d'animation)
1979 : La Gueule de l'autre, de Pierre Tchernia
1973 : La Gueule de l'emploi, de Jacques Rouland
1971 : Le Viager, de Pierre Tchernia
1968 : Le Petit Baigneur, de Robert Dhéry
1965 : Pleins feux sur Stanislas, de Jean-Charles Dudrumet
1964 : Allez France!, de Robert Dhéry
1963 : Carambolages, de Marcel Bluwal
1962 : Un cheval pour deux, de Jean-Marc Thibault
1962 : La Guerre des boutons, d'Yves Robert
1961 : La Belle Américaine, de Robert Dhéry
1960 : La Brune que voilà, de Robert Lamoureux
Réalisateur
1988 : Bonjour l'angoisse
1979 : La Gueule de l'autre
1974 : Les Gaspards
1971 : Le Viager
© Abaca, Pascal Baril
Pierre Tchernia était très seul
Décédé il y a quatre ans, Pierre Tchernia a eu une fin de vie assez douloureuse et empreinte de solitude. À plus de 80 ans, le célèbre animateur et grand ami de Arthur, passait souvent ses jours de l'An seul, chez lui. "Mes problèmes de hanche ne s'arrangent pas avec mes vieux jours. Ce qui m'oblige à utiliser une chaise d'infirme. Oui, il faut bien le dire : je suis infirme. (...) À Noël, j'irai dans ma famille, chez mon fils. Même si je n'aime pas la dinde... Et pour le Nouvel An, je serai sûrement ici, seul, loin de toutes les fêtes parisiennes. Mais ne vous en faites pas pour moi", confiait-il au magazine Ici Paris en 2013.
Portrait de Pierre Tchernia pris à Paris, en 1989.
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